Découvrez la scène musicale girondine vue par les bibliothécaires musicaux !

Entretien avec Thierry Aznar, auteur du livre « Kiss, de New York Groove à Detroit Rock City »

A l’occasion de la sortie de son quatrième ouvrage, petit entretien avec notre collègue de la médiathèque de Saint-Médard-en-Jalles, Thierry Aznar. Où il est question de KISS, de la scène musicale new yorkaise des années 70, du rock de Detroit et… de la place réservée au Métal en médiathèque.

Thierry, tu viens de publier chez Camion Blanc ton quatrième ouvrage, « Kiss, de New York Groove à Detroit Rock City », retraçant l’itinéraire d’un des groupes phares de la scène rock des années 70. Comment est né ce livre ?  Qu’apporte ce livre à tout amateur de musique ?

Les nombreux ouvrages déjà parus au sujet du groupe Kiss (principalement en anglais), biographies, témoignages ou interviews, révèlent une histoire passionnante mais aussi énormément de contradictions et mêmes d’incohérences en fonction des auteurs. Pensé comme un roman, ce livre est en quelque sorte une enquête sur les traces de Kiss entre 1972 et 1976 pour démêler toutes ces zones d’ombres. J’ai croisé toutes les sources connues pour en tirer une histoire unique, cohérente et plausible au plus proche de la réalité même si pour cela, j’ai parfois du déduire ou imaginer certains passages ou dialogues. À ma connaissance un tel travail n’a encore jamais été fait et c’est pourquoi je me suis lancé dans ce projet.

Je crois qu’il n’est pas nécessairement besoin d’être amateur de Kiss, ni même de musique, pour lire et je l’espère, apprécier ce livre. (Après tout, est-il obligatoire d’être un gangster ou un policier pour apprécier un roman policier ?). Il s’agit avant tout d’un parcours hallucinant, celui de quatre new-yorkais inconnus et très ambitieux, plongés au cœur de l’industrie musicale déjantée aux Etats-Unis durant les années 70’s. L’histoire débute à New York en 1972 et se termine à Detroit en 1976. Entre ces deux étapes, le groupe sillonne les Etats-Unis et croise une multitude d’autres formations : New York Dolls, Alice Cooper, Iggy pop & The Stooges, Aerosmith, Blue Öyster Cult, Rory Gallagher, Savoy Brown, Rush, Silverhead, Isis… Durant cette période, Kiss passe de l’anonymat le plus total à la gloire éclatante. Comment cela a t-il été possible ? C’est cette épopée rocambolesque que je propose de découvrir avec ce livre.

Après les 3 tomes anthologiques sur le métal que tu as publié en 2014, «Hard rock & Heavy metal : 40 années de purgatoire », quel regard portes-tu aujourd’hui sur ce genre musical ?

Le Metal est un genre qui se porte très bien dans l’industrie musicale actuelle parce que le concert est redevenu essentiel pour la survie des groupes et que c’est un domaine qui à toujours été privilégié par les formations de Metal. Les groupes de Metal sont les seuls, ou presque, à proposer régulièrement des tournées marathon de plusieurs centaines de dates à travers le monde. La scène est donc très active et dynamique de ce point de vue là. Les genres et les sous genres ne cessent de se multiplier, les fans sont là et continuent d’acheter disques et t-shirts en masse. L’incroyable réussite du festival Hellfest en France illustre tout ceci à la perfection.

En quoi KISS prolonge ses contemporains de la scène rock ou hard rock comme The Stooges, Alice Cooper, Ted Nugent ? Sont-ils des continuateurs ? Quelle place occupe le groupe KISS dans cette épopée ?

Kiss se positionne dans le monde du hard rock aux Etats-Unis au moment où les carrières d’Alice Cooper ou de The Stooges commencent à s’essouffler. Le groupe s’impose définitivement début 1976 et devient alors sans conteste le groupe hard rock N°1 aux Etats-Unis. Il le reste jusqu’en 1979 avec un pic de popularité presque irrationnel en 1978. Durant toute cette période Kiss est vraiment unique et personne ne peut lui faire de l’ombre, pas même Aerosmith qui connaît une popularité similaire mais dans un registre beaucoup moins hard rock.

Kiss jouit d’une aura incroyable aux Etats-Unis. Leur image a été reprise à travers un marchandising fleurissant : flipper KISS, Affiches KISS, autocollants KISS, figurines à l’effigie des membres ! Qu’est-ce que cela révèle selon toi (après tout les grandes figures du Glam Rock dont KISS n’est pas éloigné  n’ont pas connu pareil destin) ?

En réalité, le Kiss dont il est question dans ce livre est celui des débuts entre 1972 et 1976. Il s’agit alors d’un groupe de hard rock pur et dur, réellement dangereux et qui n’a absolument rien de glam. La perception que l’on a de ce groupe en Europe aujourd’hui est faussée parce que, pour les Français, Kiss c’est « I was made for lovin you » une chanson au relents disco du début des années 80’s. Ce livre est justement l’occasion de redécouvrir l’histoire du groupe, vraiment très loin des idées reçues de ce type.
Pour l’aspect du Marchandising, il est évident que l’image du groupe s’y prête et c’est quelque chose qui va se mettre en place à partir de 1976 puis se développer de façon exponentielle jusqu’à aujourd’hui. Kiss se décline sous à peu près tout, même un cercueil ou une croisière si vous avez les moyens.

Kiss a connu un succès phénoménal avec « I was made for loving you » en surfant sur la disco , genre en vogue à la fin des années 70. Alors, Thierry, « I was made for loving you » de Kiss ne serait-il qu’un « one hit wonder » ou est-ce l’arbre qui cache une forêt de tubes ignorés par chez nous ?

Avec cette chanson, Kiss s’impose en Australie et en Europe mais se coupe de ses fans en Amérique. C’est alors une toute autre histoire qui débute pour le groupe. Quoi qu’il en soit, depuis ses débuts, Kiss n’est pas un groupe à tubes, il a tout bâtit sur la base de ses concerts, c’est un fantastique groupe de scène. Peu diffusé en radio, même en Amérique et boycotté par une bonne partie de la presse, Kiss ne doit rien à personne, le groupe s’est construit tout seul en partant des bas fonds de New York.

Thierry, tu es discothécaire. Quel regard portes-tu sur la place de la musique en bibliothèque et du métal en particulier ? Le genre mérite-t-il d’être mieux défendu ? Le genre ne souffre-t-il pas de l’incroyable multiplicité de ses facettes ?

Aujourd’hui, je crois que la musique en général trouve une bonne place en bibliothèque partout en France. Du prêt de CD aux concerts en passant par beaucoup d’autres actions, il me semble que les bibliothèques s’adaptent assez bien et sont devenues un lieu repéré et identifié par les publics dans ce domaine.

Le Metal y a sa place comme tous les autres genres, ni plus ni moins, en fonction des critères et de l’environnement particulier de chaque Bibliothèque. Bien-sûr, une bibliothèque à Clisson, ville du Hellfest, doit à mon avis proposer un rayon Metal conséquent mais c’est du à une particularité locale. Le territoire est donc très important dans la constitution d’un fonds.
Je ne crois pas que le Metal souffre de sa vigueur, bien au contraire, c’est ce qui permet au genre de perdurer et de se renouveler sans cesse, renouvelant ainsi son public au passage. Je crois que c’est aux discothécaires de rationaliser cette effervescence du genre pour la rendre lisible et attrayante auprès des publics.

Le groupe KISS est présent dans les collections des bibliothèques :

 

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